- "Et vous avez ici votre carte de visite...", dit-il alors que j'en extrayais une de mon portefeuille.
"Ceci est typiquement américain, ou ... des citoyens des USA. Leur carte est considérée comme un passeport, leur lettre d'introduction, leur lettre de crédit, leur mot de passe dans la socièté, leur admission au ciel et la clef de tout ce qu'ils désirent.
Je crois même qu'elles peuvent être imprimées par centaine pour quelques francs."
Il n'a pas daigné regarder ma carte, et, embarassé par ses remarques, je la replaçais dans mon portefeuille. Il contenait d'autres papiers qui constituaient pour moi un intérêt considérable. Ceux-ci avec ma carte m'avaient bien servi dans des affaires terrestres, mais je sentais instinctivement qu'ils n'avaient aucune valeur à présent... Et certainement pas auprès du professeur! Je fermais donc mon portefeuille et j'allais le replacer dans ma poche. Mais il retint le mouvement de mon bras et, me regardant d'un regard chargé de sens, il me dit:
- "Et vous n'auriez pas un papier qui ne ressemble pas aux autres?"
Je réfléchis un moment et tentais de discerner sa pensée, l'étrange lumière dans ses yeux était reconnaissable entre toutes.
Il me signifiait que j'avais précisément dans mon portefeuille ce qu'il s'attendait à recevoir. Qu'est-ce que c'était? Je pensais rapidement..., ce fut comme un résumé de tout ce qui avait bien pu m'être donné durant ma vie entière. Mais, en un éclair, une chose surgit devant moi: le carré de papier que l'étranger m'avait donné sur le paquebot.
- "J'ai ceci", répondis-je, en le tirant de mon portefeuille. "C'est seulement une adresse, et quelques lignes supplémentaires", ajoutai-je, tandis que je remarquais pour la première fois que l'écriture sous le nom et l'adresse constituait une sorte de sentence. "Peut-être est-ce à ceci que VOUS pensez." Je ne pouvais pas contribuer à l'impressionner par le fait que j'avais relevé son évidente référence à un certain papier particulier...
-"Oui, c'est ce que je demandais. Cela signifie peu pour vous, sans doute guère pour moi. Mais pour d'autres cela signifiera une grande affaire quand le moment sera venu.
Je vous suggère seulement de bien le préserver, de le garder toujours à portée de main et de ne le montrer que lorsque vous serez INDIRECTEMENT sollicité pour le faire. Si vous voulez bien demander à me voir à nouveau lundi matin, vers midi, je serai très heureux de répondre à votre seule question! C'est une journée magnifique... Je pense que vous aviez vécu une agréable traversée de la mer! Vous aimez notre Paris?"
(à suivre)
Episode précédent, début du Voyage
Version américaine:
"And you have there your business card," he said, as I drew one from my wallet. "That is typically American, or rather of the United States citizen. His card he considers as his passport, his letter of introduction, his letter of credit, his pass-word into society, his admission into heaven and his key to all that he desires. Yet I believe they can be printed for a few francs per hundred."
He did not offer to look at my card, and, abashed at his remarks, I returned it to my wallet. There were other papers there of considerable interest to me. They - with my card - had served me well in worldly matters, but I felt instinctively, that they were of no value now. Certainly not to the Professor. So I closed my wallet and made to place it in my pocket. He detained my arm in its movement, and looking significantly at me said:
"And have you not a paper there which does not resemble the others?"
I thought a moment - and I seemed to discern his meaning; for the strange light in his eyes was unmistakable. It meant that I did have - that I could take from my wallet that which he fully expected to receive. What was it? I thought rapidly - it seemed like a resume of my whole life and all that had ever been given to me. But, in a flash, one thing stood out before me - the square piece of paper which the foreigner had given me on the steamer.
"I have this," I replied, as I drew it from my wallet. "It is only an address, and a few lines of other writing," I added as I noticed for the first time that the writing below the name and address was in the form of a sentence. Perhaps this is what YOU mean." I could not help impressing him with the fact that I had noticed his evident reference to some particular paper.
"Yes, this is what I sought. It means little to you - perhaps little to me. It will mean a great deal to others at some time. I merely suggest that you preserve it, keep it always at hand and show it only when you are INDIRECTLY asked to do so. If you will call to see me again on Monday morning - about noon - I will be very glad to answer the one question for you. It is a beautiful day. I trust you had very pleasant trip across the sea. Do you like our Paris.?"
Commentaires:
"américain ou des citoyens des USA": petite nuance pour faire sentir l'impérialisme américain...
Le carré de papier revêt une importance symbolique. Il apparaît comme une "sentence"... Le terme sentence est ambigü et suggère à la fois un formulation et un jugement. après un procés. La rencontre de "l'indien" était donc bien une "épreuve"..
Après la recherche astrale du temple, ce premier entretien avec le professeur représente naturellement le passage du "premier degré du Temple". Il n'est possible de le vivre dans son étégralité que si l'on est en possession du "carré de papier"... Quel est donc ce "carré de papier"?
"VOUS" et "INDIRECTEMENT", les mots en majuscules transmettent naturellement un sens complémentaire caché... C'est un procédé que Lewis utilisait dans certaines monographies pour transmettre un sens ésotérique à l'aide d'une phrase à reconstituer en fouillant le texte..
"Cela signifie peu pour vous et pour moi... " Lewis et le Guide ont naturellement passé le niveau psychique du "premier degré", mais pas forcément le lecteur. L'épreuve concerne les rosicruciens qui suivent le cheminement initiatique.
"Vous avez vécu une agréable traversée de la mer" . Naturellement cette formulation arriverait comme un cheveu sur la soupe si la rencontre ne se situait pas dans le monde astral... et le "je répondrais à votre seule question" est naturellement la "promesse" des Guides de la Rose+Croix au premier degré du temple.
"Vous aimez notre Paris?"... "Paris" constitue donc le nom de code qui correspond dans le "voyage du Pèlerin" aux premières étapes du cheminement rosicrucien.