En 1927, un jeune architecte vint s'installer chez nous. Il était membre de la Loge et semblait être exactement ce dont Stanley et moi avions besoin pour nous aider.
Il possédait une voiture et prenait un grand plaisir à m’emmener soigner les personnes qui faisaient appel à moi. Nous le traitions comme un membre à part entière de notre famille.
C’était un artiste talentueux, avec de multiples compétences. Ensemble, nous avons rénové toutes les salles de la Loge.
À son arrivée, il possédait une vieille décapotable assez usée. L’amitié qui nous liait tous trois était si chaleureuse que nous décidâmes d’acheter ensemble une nouvelle voiture.
L'ancienne fût estimée à 250 dollars et nous rajoutâmes 800 dollars pour l'acquisition de la nouvelle. Elle n’était pas neuve et avait déjà roulé 2 400 km. Nous partageâmes les mensualités et les frais de garage.
A son arrivée, il avait annoncé qu’il vivrait avec Stanley et moi pour toujours. Et pendant un an et demi, nous avons tous été très heureux.
J’apprécie que ceux qui partagent mon quotidien soignent leur apparence et portent des vêtements élégants.
Ce jeune homme avait traversé des épreuves pendant plusieurs années. Il était veuf.
En revanche, il venait d’obtenir un poste rémunérateur dans une entreprise bien établie. Je lui conseillai donc d’acheter un nouveau costume et un manteau. En effet, les vêtements qu’il portait étaient si usés qu’ils semblaient n’avoir jamais été nettoyés ni repassés, et l’allure toujours impeccable de Stanley accentuait encore davantage cette impression.
Il souhaita que je me joigne à lui pour se rendre dans les boutiques appropriées, ce que je fis.
On aurait à peine reconnu le jeune homme une fois qu’il eut adopté sa nouvelle tenue. Il reçut de nombreux compliments pour son élégance et, assez rapidement, il devint vaniteux.
À cette époque, le frère de mon mari, arrivé d’Angleterre, nous rendit visite, et nous fûmes conviés dans de nombreux lieux particulièrement raffinés. Son poste gouvernemental à Londres l’amenait à tisser des liens ici avec certaines des familles les plus éminentes de Boston.
Parmi elles figurait Mlle Clara Sears, propriétaire de Fruitlands à Harvard, dans le Massachusetts. Elle nous convia à prendre le thé, ce qui se révéla être une invitation mémorable.
Mlle Sears nous fit personnellement visiter l’ensemble du domaine. Elle était propriétaire de la dernière maison Shaker d’Ann Lee, ainsi que de l’ancienne demeure des Alcott, où des philosophes tels qu’Emerson, Thoreau et d’autres avaient l'habitude de se réunir. Elle possédait également une maison amérindienne abritant une collection de symboles, d’instruments et de vêtements portés par les Indiens lors de la guerre qui leur fut menée ici.
Fruitlands est un lieu incontournable à visiter. Grâce à la nouvelle voiture et à notre ami pour la conduire, la visite de mon beau-frère fut mémorable. Nous organisâmes de nombreux pique-niques, des sorties en canoë sur la rivière Charles et explorâmes tous les sites d’intérêt. Mon beau-frère repartit chez lui ravi.
Il avait beaucoup apprécié notre maison. Il déclara avoir été reçu dans de nombreuses demeures élégantes en Angleterre, mais qu’aucune ne correspondait autant à ses goûts que la nôtre.
À l’automne 1928, je souffris de problèmes dentaires dus à une infection d’une dent, qui provoqua également une affection connue sous le nom de bouche de tranchée. Ma lèvre et le côté gauche de mon visage enflèrent, et un érysipèle se déclara. Je fus très malade et mon état nécessita les soins d’une infirmière jour et nuit pendant deux semaines.
Je porte encore une cicatrice sur la joue près de mon nez, et parfois le côté gauche de mon visage semble comme paralysé.
Une chère Sœur de la Loge prit en charge la cuisine, et le jeune homme qui vivait avec nous se montra d’une grande aide pendant cette épreuve.
Les Gémeaux ont en charge l’oxygène dans le sang, et donc de toute maladie où le sang participe de manière prépondérante à la guérison. Je dus me faire extraire toutes les dents et faire faire des prothèses complètes pour le haut et le bas.
Pendant leur fabrication, je continuai à donner mes conférences du dimanche soir et personne ne remarqua l'absence de mes dents.
A une époque la mère d'Elizabeth vint séjourner chez nous et me persuada d'aménager un jardin dans une partie de la cour, promettant de me fournir des annuelles de son propre jardin.
Pour mener à bien ce projet, quelques travaux étaient nécessaires. Un jeune Anglais, membre de la Loge et très attaché à Stanley et à moi, proposa de m’aider. Il dut extraire quelques pierres le long de la clôture, couper trois petits bouleaux qui mouraient, et j’achetai de la terre et du sable pour combler l'espace et créer le jardin.
Celui-ci fut toujours pour moi une source de joie. Il est maintenant, à mon âge de quatre-vingt-neuf ans, un merveilleux lieu de repos lorsque je me sens fatiguée.
Ce jeune homme retourna en Angleterre en 1930, à la suite du décès de son père, Depuis, il ne m’a jamais oubliée, m’envoyant chaque Noël et pour mon anniversaire un magnifique bouquet commandé chez un fleuriste local par l’intermédiaire d’un fleuriste anglais. Il m’écrit souvent, exprimant son souhait de me revoir avant de quitter ce monde.
Nous fûmes en mesure de finaliser le règlement des affaires de Mme Eager seulement à l’été 1930.
Après que la voiture de Mme Eager eut été retirée, je confiai à un membre de la Loge que ce moyen de transport me manquerait cruellement. Il me demanda :
Auriez-vous besoin d’une voiture?
Je répondis que, compte tenu de toutes mes obligations, elle me serait véritablement indispensable.
Il déclara simplement que dans ce cas, j'en aurai une.
Il constitua alors un comité et envoya des lettres à tous les membres pour solliciter des promesses de dons. Chacun contribua à hauteur de cinquante cents par mois pour certains à vingt dollars pour d’autres.
Ainsi, en l’espace d’un mois, je pus acquérir une Peerless. Un membre célibataire de la Loge se proposa pour être notre chauffeur chaque fois que nous en avions besoin. De plus, un jeune homme résidant chez nous, étudiant à l’université de Boston depuis trois ans, était également disponible pour me conduire lorsque je devais me déplacer.
Cette voiture m’occasionna bien des tracas, mais je suppose que cette expérience, bien que coûteuse, m’était nécessaire.
Mon avocat détenait le deuxième prêt hypothécaire sur les quatre maisons voisines de la mienne. Celle d’à côté, le numéro 196, avait été vendue au moment où nous avions acheté la nôtre, mais les nouveaux propriétaires n’avaient jamais rien payé.
Un jour, il me demanda si je serais intéressée par cette maison dans la mesure où la famille qui y vivait venait à être expulsée.
Je répondis que je ne demanderai pas leur expulsion, bien que cette famille ne se soit jamais adaptée à notre quartier, mais que si la maison était vacante, je pourrais y réfléchir.
Il organisa alors l'expulsion de la la famille par l'intermédiaire de la banque, et tandis que j’étais en voyage en Californie, fit entièrement rénover la maison.
Nous étions en 1929.
Si j’avais su qu’il allait agir ainsi, je lui aurais demandé d’attendre mon retour. En effet, les travaux étaient si mal exécutés que je dus tout reprendre de zéro.
Tant de fois différentes écoles m'avaient sollicitée afin que que j'accueille leurs étudiants que je m'engageai dans l'acquisition de cette maison avec l'ambition de concrétiser ce projet.
Le deuxième prêt hypothécaire avait été placé à la Banque fédérale, et mon avocat voulait le sauver; il me proposa de régler les intérêts des hypothèques et les taxes à la banque et de conserver ensuite ce qui serait gagné.
La nature des Gémeaux les pousse à accueillir chaque opportunité avec enthousiasme, toujours animés par leur désir de s’immiscer dans divers univers. Mon ascendant Gémeaux rendait tout refus d’autant plus difficile.
J’étais déjà très occupée à faire face aux frais de notre maison et à faire vivre la Loge, sans envisager de financer une autre maison.
Il me remit 300 $ pour contribuer à son ameublement, une somme dérisoire face à l’ampleur de la tâche
Je repris l’habitude de fréquenter les salles des ventes et, à la fin de l’année 1930, la maison s’était remplie de jeunes femmes, sous la gouvernance d’une intendante avisée. Celle-ci gérait au mieux la pension, fixant les tarifs à sa guise et assurant l’approvisionnement en nourriture.
Je m’acquittais des taxes et des intérêts bancaires et pendant une dizaine d'années, je continuai ainsi, tirant de modestes bénéfices qui, néanmoins, me permettaient de faire face à mes autres engagements.
Stanley n’était pas un financier, et se contentait de gérer l’argent que je lui confiais, de tenir les livres de comptes et de régler les factures. Nous partagions un compte commun. J’avais été la première à louer des chambres dans cette rue, et, en 1951, une maison sur deux s’était transformée en maison d’hôtes.
Les propriétaires fortunés qui avaient acheté les maisons à leur construction, cinquante-cinq années plus tôt, sont à peu près tous décédés. Il reste aujourd'hui seulement deux des propriétaires originaux qui vivaient dans cette rue en 1926.
Au cours de l’été 1930, le mari d’une officier de la Loge m’écrivit, affirmant que j’étais la seule à pouvoir l’aider à surmonter une difficulté. L’année précédente, son épouse avait été appelée à Détroit pour veiller sur sa sœur, atteinte d’une maladie incurable.
Elle était restée là-bas jusqu’à son décès. Ayant hérité de mille dollars, elle regagna son foyer une fois la succession réglée.
Son mari avait fait appel à moi alors que, partie depuis une année, elle lui avait écrit qu’elle n’avait pas l’intention de revenir. Il pensait qu'en ma qualité de Maître de la Loge à laquelle elle appartenait, j'aurais l'influence nécessaire et pourrais la convaincre de retourner auprès de son mari.
Bien entendu, je me rendis chez lui, et il me confia son histoire.
Je lui expliquai que je ne pouvais rien faire, que sa femme disposait de sa propre volonté et que je n’avais aucune autorité pour contraindre quiconque à agir contre son gré.
Néanmoins, je m’engageai à lui écrire pour l'informer que j’étais allée le voir à sa demande.
Il gérait une station-service dotée d’une unique pompe. Naturellement, j’éprouvais de la compassion pour lui, à soixante-deux ans, il se retrouvait seul et, de toute évidence, démuni de ressources suffisantes.
Elle revint pour un séjour de quelques semaines et, lorsqu’arriva pour elle le moment de repartir, elle vint me trouver. Elle déclara qu’elle ne pouvait plus vivre dans la précarité, les revenus du couple n’étant pas suffisants pour répondre aux besoins de son mari et aux siens. Elle précisa qu’elle avait l’intention de se lancer dans la couture et que, s’il le souhaitait, il pouvait la rejoindre là-bas.
Après son départ, je continuai à rendre visite à son mari, lui achetant ses œufs, ses fruits, ses légumes et son essence, et j’encourageai les membres de la Loge à faire de même.
Si j’avais su ce que les seize années suivantes me réservaient, je doute que j’aurais eu le courage de m’engager dans cette voie, au départ.
En mai, deux sœurs de mon mari nous rendirent visite. Après avoir séjourné un mois chez nous, elles se rendirent à Cleveland visiter leur frère et je fus du voyage.
Nous voyageâmes en autocar à travers les Montagnes Blanches. Après quelques jours, nous prîmes un autre autocar pour le Vermont, faisant une halte à St. Albans, afin de rendre visite à mon neveu, Arthur Pariscan, et à sa femme Sadie.
J’avais espéré un temps clément afin qu’elles puissent savourer la vue depuis le sommet de St. Albans Hill, l’un des panoramas les plus splendides qu’il m’ait été donné de contempler. Les dieux de la météo semblèrent avoir entendu mon vœu, car le temps fut aussi magnifique qu'on pouvait l'espérer.
Nous pûmes admirer la vue sur le lac Champlain, parsemé de nombreuses îles, et les Adirondacks en arrière-plan, offrant un spectacle inoubliable au moment du coucher du soleil.
Le reflet du soleil rouge associé au bleu du ciel sur le lac ne peut être reproduit sur une toile.
Mon neveu nous conduisit au sommet de la colline, puis, une fois redescendus, ce fut une promenade le long du lac pendant des kilomètres, jusqu'à la tombée de la nuit.
Notre séjour chez mon neveu et sa femme s'étendit sur deux jours, après quoi nous prîmes le train pour Montréal.
Pendant les trois jours de notre escale dans cette charmante ville nous vistames tous les sites d'intérêt possibles, puis nous embarquâmes à bord d'un bateau, franchissant les écluses du fleuve Saint-Laurent jusqu’aux Mille-Îles et aux chutes du Niagara.
La traversée des Mille-Îles nous offrit un paysage magnifique. Nous eûmes le privilège de pouvoir admirer les splendides résidences d’été sur les différentes îles, de nuit, puis de jour. La nuit offre un spectacle particulièrement féérique.
Il y a quinze ans de cela et le paysage a dû changer depuis lors.
Nous descendîmes sous les chutes, portant des cirés, contemplant la brume induite par la chute des eaux. Ce spectacle raviva en moi le souvenir d’une histoire d’amour vécue dans les années vingt, qu’il me faudra bien évoquer.
Nous nous amusâmes comme des fillettes émerveillées face à ce prodige de la nature.
Des chutes du Niagara, nous nous rendîmes à Cleveland. Après quelques jours, je laissai mes belles-sœurs sur place pour prendre le chemin du retour. Elles firent un détour par notre maison avant de s’embarquer à nouveau début septembre pour l'Angleterre.
Au cours de l’été, Grace Partridge, membre de la Loge, dont le mari avait fait appel à moi, revint récupérer quelques unes de ses affaires. Elle regagna ensuite Détroit, où en août, elle tomba malade et passa par la Transition, le 7 octobre.
Ses amis, là-bas, savaient que j’étais en contact avec son mari et que je l’avais tenu informé de sa maladie, ils me prévinrent donc, et je partis immédiatement lui rendre visite.
Dès que M.P. m'aperçut, il comprit que j’étais venue lui annoncer le décès de Grace. C’était l’homme le plus démuni et le plus ignorant de la vie en général qu’il m’ait jamais été donné de rencontrer. À sa question, je répondis que oui, elle était partie.
Il dit,
Eh bien, madame Clemens, vous devrez tout prendre en charge, je suis complètement démuni.
Les gens de Détroit chez qui vivait Grace comptaient également sur moi pour tout gérer. Ce que j'entrepris.
Sachant qu’elle aurait voulu que tout soit fait dans les règles, je choisis de ne pas faire rapatrier son corps ici. J' adressai à ses amis un télégramme leur demandant de procéder à l'incinération et de veiller à ce que les cendres me soient apportées. Ce fut l’ami qui l’avait accompagnée lors de sa dernière visite qui les apporta.
Je tins une cérémonie dans le Temple, en présence de son mari, puis nous dispersâmes les cendres depuis le pont de Cottage Farm dans la rivière Charles.
M.P. passa la nuit chez nous, puis nous le reconduisîmes à son domicile de Canton, dans le Massachusetts, situé à une vingtaine de kilomètres d'ici.
Il nous confia alors:
Il me faudra trouver un avocat. Pourriez-vous m’en recommander un?
Je lui conseillai le mien, qui appartenait à la Loge et connaissait Grace. Il me demanda de prendre un rendez-vous pour lui, à son domicile. Je l'y accompagnai.
La maison était sale, n’ayant pas été nettoyée depuis son départ. Je dus recouvrir les chaises et la table de journaux pour permettre à l’avocat de disposer les documents juridiques préparés par M.P.
L’avocat emporta les documents pour les étudier dans son cabinet. Quelques jours plus tard, nous nous rendîmes à nouveau chez lui en compagnie de l’avocat.
Lorsque ce dernier lui demanda à qui reviendrait la propriété, l’homme, après quelques instants de réflexion, déclara :
Mme Clemens est la seule personne qui ait jamais fait quelque chose pour moi, je souhaite qu'elle hérite de la propriété dès maintenant, et qu’elle l'utilise à sa guise. Je désire seulement le privilège d’y vivre le reste de ma vie.
Après quelques instants, je répondis,
Eh bien, je vais la prendre, la nettoyer et en faire un lieu où les membres de la Loge pourront venir passer le week-end.
Si j’avais su ce qui m’attendait en prononçant ces quelques mots, j’aurais plutôt dit:
Non, merci, mais un Gémeaux ne recule jamais devant une nouvelle expérience mettant à profit ses multiples dons.
Nous étions en novembre 1931.
Je n'entrepris aucun travaux pendant l’hiver, mais je rendis visite à M.P. pour prendre de ses nouvelles et lui apporter quelques plats cuisinés. Il avait vendu ses deux cents poules et ses fruits et légumes, ce qui lui permettait de subvenir à ses besoins.
Grace avait laissé une assurance de 1 000 $ à son nom. Il me demanda de gérer cet argent pour lui lorsqu'il lui serait versé et qu’il m'en demanderait au fur et à mesure de ses besoins.
Au printemps 1932, il devint impatient de me voir rénover la maison. La première chose à faire était de la nettoyer.
Certains membres de la Loge se joignirent à moi pour me fournir leur aide.
Le grenier était rempli de vieux journaux datant de 1895 etc.. Nous fîmes de nombreux feux de joie brûlant tout ce qui pouvait l'être.
Un chien dormait sur son lit, et ce dernier, son matelas et ses couvertures étaient si sales que je dus les brûler également.
Avec mon esprit créatif, lorsque j’entreprends quelque chose où mon don artistique peut s’exprimer, je crée tout d'abord une image dans mon esprit et lorsqu'elle est parfaitement nette, je peux envisager de la concrétiser. Là, je voyais clairement qu'avec du travail et un peu d’argent, la petite maison de campagne pouvait être transformée en une charmante villa.
Mon ami, qui nous avait prêté main forte précédemment partageait la même vision que moi et proposa de m’aider à financer les améliorations à apporter.
Nous envisageâmes de faire de ce lieu une maison de repos gérée par une amie infirmière afin que nos amis convalescents puissent y séjourner pour se rétablir.
Ce lieu chargé d’histoire, situé à quelque distance d’une haute colline, avait vu, deux cent cinquante ans auparavant, le roi d’Angleterre faire édifier une élégante demeure pour sa maîtresse au sommet de cette colline, tandis que cette modeste maison était réservée aux domestiques.
A proximité, se trouvait une vaste grange, équipée de stalles pour les chevaux et quelques vaches, et sur une large plateforme surélevée, étaient entreposés des traîneaux utilisés en hiver.
Lorsque Back Bay, à Boston, fut aménagée, de la terre fut extraite de cette colline pour servir de remblai. Aujourd’hui, je réside sur une partie de ce sol, là où autrefois la rivière Charles s’étendait jusqu’à Massachusetts Avenue.
À l’endroit où s’élevait jadis cette colline, derrière la petite maison, s’étend à présent une vallée profonde de cent pieds.
Lorsque j’entrepris d’apporter les améliorations projetées, je présumais que l’avocat responsable avait pris en charge tous les aspects juridiques de la transaction, tels que les actes.
Il avait été appelé hors de chez lui en raison de la maladie et de la mort d'un de ses fils, qui était avec sa femme en visite dans sa famille à Pittsburgh, en Pennsylvanie.
J’engageai un charpentier pour construire une véranda de vingt-et-un mètres autour de la partie en L et je fis appel à des peintres et des électriciens afin d’installer des prises électriques aux emplacements requis. Je fis peindre l'extérieur de la maison en blanc agrémenté de garnitures vertes, et je transformai la cuisine d’été en une véritable cuisine.
Sachant qu’une cheminée était indispensable dans la maison, je cassai le plâtre dans le but d'en découvrir une, puis j'aménageai une salle de bain. Une fois les travaux terminés, le rez-de-chaussée offrait une cuisine, une salle à manger, un salon et une chambre, ainsi que deux chambres et une salle de bain, à l’étage.
Nous avons meublé chaque pièce, peint les vieux meubles, recouvert les chaises, embelli la véranda avec des hamacs coulissants, des tapis en fibre et des auvents verts. Il ne manquait rien au confort et la beauté lorsque les travaux fûrent terminés.
Le 4 juillet, il y eut un pique-nique réunissant trente personnes et tous trouvèrent mon travail remarquable.
À son retour, mon avocat nous rendit visite et fut horrifié en découvrant la maison ainsi rénovée, manifestement conscient de n’avoir pas pleinement pris en charge l’aspect juridique.
Tandis que nous prenions notre rafraîchissement, deux femmes, anciennes voisines et amies de Grace, montèrent les escaliers. Elles avaient été, elles aussi, membres de la Loge, et l'une d'elles, une jeune fille, prétendit que j’avais guéri ses yeux. Elles ne souhaitèrent pas entrer, mais désirèrent voir M.P.
Elles habitaient New York, où la jeune fille enseignait le français dans une école. Elles campaient alors près d'un petit étang non loin d'ici. Elles demandèrent à M. P. de faire quelques pas avec elles, et un des membres entendit l’une d’elles lui demander pourquoi il m'avait fait don de la maison et ce qu'il en retirerait.
À partir de ce jour, l’attitude de M.P. envers moi changea. La Sœur que nous comptions installer pour gérer la maison fut soudainement touchée par une maladie grave, contractée auprès d’un patient, et elle s’éteignit en trois jours.
Ne pouvant me rendre sur place plus de deux fois par semaine, je vis ces femmes passer l'essentiel de leur temps dans la maison. Elles se rendirent au registre foncier et découvrirent que mon avocat n’avait pas enregistré l'acte de donnation établi en ma faveur, et M. P. leur remit un nouvel acte, qu’elles enregistrèrent immédiatement.
Cela se passa alors que nous étions à St. Albans pour une visite, à la fin du mois d’août.
A notre retour, nous étions huit, à nous rendre sur place, comme à l’accoutumée pour le week-end, mais l’accès nous fut interdit. Toutes les portes et les grilles étaient verrouillées. M.P. Apparut soudain, hors de lui, vociférant à pleins poumons que nous ne pouvions entrer et qu’il avait besoin d'argent.
De retour chez moi, je pris contact avec mon avocat, et, sans m’étendre davantage, une action en justice fut engagée contre les deux femmes et M. P. Il fallut cinq ans pour récupérer les lieux.
J’avais dépensé 1 500 $ pour remettre la maison en état.
Ces deux femmes avaient convaincu M.P. qu’elles avaient acheté la propriété, qu’il pourrait y vivre et qu’elles le rémunéreraient pour en prendre soin en leur absence.
Durant les cinq années que dura l’affaire, ces deux femmes passèrent leurs étés dans la maison, utilisant tout ce qui m’appartenait. Lorsque l’affaire fut enfin réglée et que je pus y retourner, la maison était dans un état de saleté repoussante, et M. P. avait cédé à ces femmes tous les meubles qu’il m’avait offerts et que j’avais restauré à mes frais.
Je découvris que le retard dans le règlement de l’affaire était dû à une amie de Mme P., résidant à Détroit, qui avait prétendu auprès de mon avocat que la propriété lui avait été léguée. Ce dernier collaborait avec elle pour tenter de le démontrer, ce qui aurait pu me faire perdre l’ensemble de mon investissement dans la maison.
Lorsque l’affaire fut enfin entendue, cette amie arriva de Détroit. Son dossier devait être examiné en premier.
Je la rencontrai la veille de l’audience, et elle tenta de me persuader de m’engager à ne pas me présenter au tribunal lors de l’examen de son dossier. Je refusai, déclarant que je serais présente pour vérifier à quel point sa version des faits était conforme à la vérité.
Elle disparut cette nuit-là sans prévenir personne. Elle ne pouvait apparemment pas m’affronter devant le tribunal, car son affaire était montée de toutes pièces, ne faisant ressortir aucune vérité.
Je détenais des lettres que M.P. m’avait envoyées au cours de l’année, dans lesquelles il confirmait m’avoir fait don de la propriété, ce qui l’empêchait de le nier.
Les artisans ayant participé aux travaux de rénovation lui demandèrent pourquoi il m’avait cédé la maison. Il répondit qu’il manquait de moyens pour acquitter ses taxes foncières. En effet, j’avais prévu de lui fournir de quoi subvenir à ses besoins en nourriture, vêtements et autres nécessités.
À l’issue du procès, je me rendis chez lui. Il m’accueillit sur les marches et déclara: Eh bien, vous avez remporté la victoire. Je répondis:
Oui, et proprement. Maintenant, nous allons reprendre nos relations là où elles se sont arrêtées il y a cinq ans et oublier ce qui s’est passé.
Cependant, après cet événement, il ne me fut plus jamais agréable de lui rendre visite.
J’autorisai ma nièce à séjourner là-bas durant l’été, après avoir fait rénover et remeubler la maison.
À l’automne, je publiai une annonce pour la mettre en location, n’étant pas en mesure d’assumer les taxes et les frais d’entretien sans revenus provenant de cette propriété.
M.P. tirait un modeste revenu de sa station-service. Il avait alors soixante-cinq ans, je le fis donc bénéficier d’une aide sociale, ce qui lui assura des ressources suffisantes pour vivre dignement.
La famille à qui j’avais loué la maison s’était engagé à entretenir le logement et le maintenir en l'état, mais l’homme se révéla être paresseux et laissa la propriété se dégrader. Une loi protégeant les locataires contre les expulsions étant entrée en vigueur, je ne pus ni les déloger ni augmenter leur loyer.
La famille accueillait un nouveau-né chaque année. M.P. cessa de résider sur place et s’installa en ville chez des personnes qui l’hébergeaient en échange de son allocation sociale. Il devint fort désagréable et difficile à côtoyer pour quiconque. Ainsi, la municipalité le prit à sa charge, ce qui est toujours le cas à ce jour, en 1951.
Stanley adorait ce lieu. Après avoir loué la maison, je fis construire une petite cabane équipée de toilettes à chasse d’eau, au bord de la vallée, à l’arrière, afin d’y organiser des pique-niques. Cependant, après son décès en 1942, je n’y suis plus jamais retournée, sauf pour des motifs professionnels.
Je vous confierai ce que j’ai trouvé dans la propriété lorsque je la vendis, en 1947. Cette expérience toute entière ressemble à un mauvais cauchemar.
Entre la gestion de ma maison, celle des filles à côté et les responsabilités de la Loge, mes mains et mon cœur étaient pleinement occupés. S’il m’incombait une quelconque dette karmique envers M.P., elle a assurément été acquittée.
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Anglais : He received many compliments for his elegance and, quite quickly, he became vain.
Allemand : Er erhielt viele Komplimente für seine Eleganz und wurde ziemlich schnell eitel.
Espagnol : Recibió muchos cumplidos por su elegancia y, bastante pronto, se volvió vanidoso.
Italien : Ricevette molti complimenti per la sua eleganza e, abbastanza presto, divenne vanitoso.
Portugais : Recebeu muitos elogios pela sua elegância e, bem depressa, tornou-se vaidoso.
Grec : Έλαβε πολλά κομπλιμέντα για την κομψότητά του και, αρκετά γρήγορα, έγινε ματαιόδοξος.
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