Ce fut la première fois que deux candidats à la présidence se rencontrèrent, nous étions en 1912.
En 1948, on dit que la rencontre entre Thomas Dewey et Harry S. Truman était la première fois que deux candidats à la présidence se rencontraient, lors de l’inauguration de l’aéroport d’Idlewild ; je pris donc l’initiative et envoyai la lettre suivante à tous les journaux.
Le Boston Post la publia dans le Daily Post et le Herald dans le Sunday Herald, comme suit :
RAPPEL DE LA RENCONTRE TAFT-WILSON À BOSTON
À l’éditeur du Herald-Tribune:
La lettre de M. David P. Clark, publiée dans le Herald le 29 août, rappelant que la rencontre entre Truman et Dewey à Idlewild n’était pas la première entre deux candidats à la présidence, m’a remémoré celle de Taft et Wilson en 1912
La date exacte était le 26 septembre 1912. Pour l'occasion, fut donnée une réception présidentielle en l’honneur des délégués de 50 nations différentes, réunis ici pour le cinquième Congrès international de la Chambre de commerce, une conférence de six jours.
J’aurais aimé qu’il soit encore possible aujourd’hui de rassembler ici ces 50 nations et de recréer l’atmosphère qui régnait lors de leur séjour parmi nous.
Si quelqu’un ayant participé aux nombreuses activités organisées pour divertir ces personnes lit ceci, je suis certaine qu’il approuvera mes propos.
L’inauguration de l'hôtel Copley Plaza donna lieu à une réception pour le président Taft et se déroula dans la nouvelle salle de bal de l’hôtel.
Le bal qui suivit la réception fut l’un des rassemblements les plus brillants qu’il m’ait été donné d’organiser.
Chaque dame portait la robe de soirée traditionnelle de son pays, assurément la plus belle qu’elle ait pu se procurer pour l’occasion.
J’eus la chance de pouvoir m’exprimer en français, car de nombreux délégués ne parlaient pas un mot d’anglais. Je découvris cependant que toutes les nations utilisaient le français, à l’exception des délégations arabes et japonaises, qui s’exprimaient en anglais.
Je crois me souvenir que la langue française a parfois été suggérée comme langue universelle.
Lorsque nous sollicitâmes 125 automobiles pour une excursion vers la Côte Nord, suivie d’un déjeuner chez Mme John Hayes Hammond, plus de 200 véhicules se présentèrent spontanément. Parmi eux figurait le maire de l’époque, M. John Fitzgerald, qui offrit trois voitures, chacune conduite par l’une de ses filles. Tout ce qui était suggéré recevait la même réponse enthousiaste.
Lorsque je repense à l’intense plaisir ressenti durant cette semaine parmi les délégués, je souhaiterais avoir 55 ans, cet âge où une femme est à son apogée, plutôt que 85, afin de revivre pleinement les frissons de ces jours inoubliables.
Je suis sûre qu’une photo de ce groupe doit être accrochée aux murs des salles de la Chambre de commerce.
Marie L. Clemens.
Boston.
Un incident concernant la publication de cette lettre mérite d’être noté.
À Noël 1948, je reçus une carte avec le message suivant:
À Marie L. Clemens,
Vous ne pouvez imaginer combien votre lettre parue dans le Herald m’a réconfortée. Vous y affirmiez qu’une femme est à son apogée à 55 ans, et me voilà ici, déprimée et malheureuse. Je la lis souvent et je voulais que vous le sachiez. J’espère que vous êtes la bonne Marie L. Clemens.
Que Dieu vous bénisse.
(signé) Une Bostonienne.
J’aurais tant aimé que cette femme signe son nom pour l’aider à sortir de sa dépression.
Revenons au Congrès: les journaux firent grand cas des différentes attractions organisées pour les délégués et me complimentèrent sans réserve, affirmant que mon travail n’avait aucun précédent dans la ville.
En 1914, nous visitâmes l’Angleterre. Nous y fûmes royalement reçus par les délégués.
Lors de certains de mes voyages à travers ce pays, je pris soin de contacter les différentes personnes présentes au Congrès, et de nombreuses activités et voyages furent organisés pour mon plaisir.
Une maxime se confirmait une fois de plus: donne le meilleur de toi-même où que tu sois, et le meilleur te reviendra en retour.
Ceux qui avaient eu la responsabilité des délégués lors de leur séjour en 1912 firent tout leur possible pour que je les accompagne tout le long de leur périple à travers le pays, et m’offrirent une généreuse somme d’argent
J’étais devenue pour eux une mère ou un général, et ils estimaient ne plus pouvoir se passer de moi. Or, j’étais en pleine organisation de la grande kermesse de l’École de médecine de l’Université de Boston, prévue pour octobre, et dès lors, tout départ était impossible. J’ai considéré cette occasion comme l’une des expériences les plus enrichissantes de ma vie.
Ma mère était décédée en janvier 1912, par conséquent, pour la première fois de ma vie, j’étais libre et tout mon temps m’appartenait pour faire ce que je souhaitais.
Une fois encore, en écrivant et en repensant à ma vie, je ne peux m’empêcher de me demander comment j’ai pu mener à bien tout ce que j’ai entrepris, en parvenant à en gérer la réalisation simultanément.
Cet automne-là, en plus de l’événement de la Chambre de commerce et de la kermesse de l’Université de Boston, j’avais l'animation habituelle de la garderie du South End à organiser. Qui plus est, la Ligue de sauvetage des animaux m’avait demandé de prendre en charge leur salon de thé lors d'un événement qui se tenait également au Copley Plaza en octobre, et je m'occupais toujours de l’Assembly Club.
Finalement, je me décidai à me délester du Club qui était devenu un fardeau inutile. Je sentais que mon temps y était gaspillé.
Je me rendis alors chez M. Codman, à qui une femme fortunée avait confié cette responsabilité et lui avouai mon incapacité à poursuivre cette tâche.
Mon mari étant sans emploi, il était nécessaire que j’utilise mon temps et mon énergie pour des choses qui amélioreraient notre situation financière.
En résumé, la gestion du Club était devenue compliquée, ces dames voulaient des déjeuners à vingt-cinq cents qui nous coûtaient soixante-quinze cents.
Après m'avoir écoutée, M. Codman me dit:
Rassemblez votre comité, et je ferai dissoudre le Club.
Je convoquai le conseil, et il leur déclara: Mesdames, Mme Clemens estime qu’elle ne peut plus diriger le Club, et sans Mme Clemens, le Club ne peut pas continuer. Je vous demande donc de le dissoudre.
Je m’adressai aux dames et leur confiai que, depuis quelque temps, j’avais le sentiment que mes efforts pour maintenir le Club en vie étaient vains, et que des opportunités plus porteuses nécessitaient désormais mon engagement.
L’une des dames prit la parole et me dit que, si je réalisais à quel point partager ma philosophie de vie aidait les nombreuses femmes qui venaient me voir avec leurs problèmes, je changerais d’avis.
Ainsi, les affaires de l’Assembly Club furent clôturées.
Lors de ma prise en charge de la gestion du Club, j’avais affirmé que je ne lancerais aucune initiative risquant d’entraîner des pertes financières pour ses fondateurs. Il fut donc convenu qu’un dollar par mois, prélevé sur les cotisations de chaque membre, serait exclusivement dédié au fonctionnement du Club, et qu’en cas de fermeture, le solde restant serait remboursé.
Ainsi, les meubles furent vendus, et je jouai un rôle dans la location des salles auprès de l’un des employés du Copley qui voulait organiser des thés dansants, très en vogue à cette époque.
Deux jeunes avocats, diplômés de Harvard, aidaient aux affaires de l’Assembly Club. Ceux-ci étaient très désireux d’entrer dans la haute société et pensaient que je pouvais les y aider.
En organisant des danses le soir auxquelles le conseil invitait ses amis, ces jeunes hommes ambitieux trouvèrent ce qu’ils cherchaient.
Ils étaient attirants, fins et irréprochables, et après un certain temps, l’un épousa la fille d’une veuve fortunée et l’autre épousa la veuve, depuis décédée, laissant au jeune mari la majeure partie de ses biens, ne laissant que très peu à sa fille.
J’apprends aujourd’hui que ces deux hommes ont cessé de se fréquenter, une rupture apparemment causée par des différends financiers. C’est ce qui se produit dans la plupart des cercles sociaux. Et je doute qu’ils viendraient à mon secours si j’étais dans le besoin et sollicitais leur aide.
En 1914, la femme fortunée qui avait fourni l’argent pour rendre possible l’Assembly Club se suicida en tombant d’une chambre d’hôtel au vingt-troisième étage, à New York.
Lorsque le Club fut abandonné, Mme I. J. Storrow lança le Women’s Club sur Beacon Street.
Noël 1913 me trouva très épuisée. M. Barron, le directeur de l’hôtel, nous invita aux Bermudes où il dirigeait l’Hôtel Hamilton. Ayant repris des forces financièrement grâce aux activités de l'automne, nous acceptâmes son invitation.
Nous appréciâmes beaucoup notre séjour là-bas. Annette Kellerman posait pour le rôle de la sirène dans le film du même nom. Je peux encore, en écrivant ceci, me remémorer tout le spectacle.
Chaque jour, nous visitions un port de l’île, observant les photographes immortaliser ses paysages. Je crois bien que nous avons même posé pour une des photos.
Cependant, j’étais tellement malade en mer à l’aller comme au retour que rien ne pourrait me convaincre de retourner aux Bermudes en bateau dans cette incarnation. Dans une prochaine, je ferai peut-être le voyage en avion.
En janvier 1915, j’ouvris un bureau d’artistes. Ayant déjà lancé de nombreux talents prêts à se produire en public, je fus convaincue d’en faire mon moyen de subsistance.
Mon mari, toujours sans emploi stable, pouvait m’apporter une aide précieuse dans ce travail, notamment pour la publicité, la rédaction de lettres et la gestion financière.
J’avais accès à toutes les maisons prestigieuses, alors j’organisais des récitals et sollicitais quelques bienfaitrices pour parrainer ces événements, et j’étais très demandée.
On disait que j’étais capable de promouvoir presque n’importe quel artiste, pour peu qu’il ait le moindre talent .
J’avais la chance de pouvoir compter sur des rédacteurs qui transformaient chacune de mes initiatives en événement mondain.
De plus, les critiques musicaux étaient toujours disposés à offrir aux artistes une évaluation juste, pouvant servir à l’élaboration de programmes pour les clubs de femmes.
Je passai toute l’année 1913 et le début de 1914 à organiser des récitals pour différents artistes à Steinert Hall, Jordan Hall, et ainsi de suite.
M. William Lindsey était alors président de l'Authors’ Club. Grâce à sa richesse et à son intérêt pour la littérature, lui-même étant écrivain, il m’aida à faire émerger de nombreux auteurs et musiciens méritants.
À Boston, entre les années 1890 et 1914, toutes les classes sociales profitaient pleinement de la vie.
De nombreux nouveaux riches aspiraient à figurer dans les chroniques mondaines aux côtés de l’élite et devenaient mécènes de toute initiative qu’on leur proposait. Grâce à cela, il m’était facile de collecter des fonds pour toute organisation que je souhaitais soutenir.
Je continuais également à m’occuper de la garderie et du Frances Willard Settlement.
En janvier 1914, j’organisai un nouveau spectacle de Mère l’Oie à l’Arena, pour la garderie du South End, et il fut tout aussi réussi que celui donné en 1912.
À l’arrivée du printemps, j’étais assez épuisée et quelque peu découragée. Stanley, privé d’emploi depuis si longtemps, était lui-même tombé dans le même état. Il pensait qu’un voyage en Angleterre pourrait m’apporter un peu de détente et me faire le plus grand bien.
Une traversée fut annoncée sur un navire, autrefois destiné au transport de bétail, puis reconverti en cargo de marchandises sèches à destination de Liverpool.
Il fut proposé pour accueillir plus de cinquante passagers, aller-retour, pour cinquante dollars. Ainsi, le 7 mai, nous embarquâmes à bord du vieux Sachem et passâmes quatorze jours en mer.
Ce voyage allait enfin m’apporter le repos dont j’avais tant besoin.
- début des Confidences de Marie-Louise
- à suivre
Anglais :
Give your best wherever you are, and the best will come back to you.
Allemand :
Gib dein Bestes, wo immer du bist, und das Beste wird zu dir zurückkehren.
Espagnol :
Da lo mejor de ti dondequiera que estés, y lo mejor volverá a ti.
Italien :
Dai il meglio di te ovunque tu sia, e il meglio tornerà a te.
Portugais :
Dá o melhor de ti onde quer que estejas, e o melhor voltará para ti.
Grec :
Δώσε τον καλύτερό σου εαυτό όπου κι αν βρίσκεσαι, και το καλύτερο θα σου επιστραφεί.