La formule "vir nobilis", littéralement "homme noble" exprime t-elle une noblesse du sang ou une noblesse du cœur qui se caractériserait par une intuition au service d'une conscience élevée?
Ce n'est naturellement pas une vraie question...
Cette conscience élevée ne s'enseigne pas. Seul celui qui l'a éveillée peut tenter dans une certaine mesure de stimuler cet élan chez ceux qui éprouveraient déjà cet éveil à l'ésotérisme...
Ainsi, dans l'école de la république qui se doit de structurer la raison, jamais l'épanouissement subjectif du ressenti intérieur ne serait permis...
Parfois certains mystiques parviennent à partager ponctuellement une ouverture à l'ésotérisme comme Balzac, qui fut martiniste, le suggère dans son "Louis Lambert", à propos de "Caius Gracchus, vir nobilis"...
"Je me souviens qu'un soir, en terminant la classe qui avait lieu de deux à quatre heures, le maître s'empara d'une version de Lambert. Le texte commençait par Caïus Gracchus, vir nobilis.
Louis avait traduit ces mots par : Caïus Gracchus était un noble coeur.
— Où voyez-vous du coeur dans nobilis ? dit brusquement le professeur.
Et tout le monde de rire pendant que Lambert regardait le professeur d'un air hébété.
— Que dirait madame la baronne de Staël en apprenant que vous traduisez par un contre-sens le mot qui signifie de race noble, d'origine patricienne ?
— Elle dirait que vous êtes une bête ! m'écriai-je à voix basse.
— Monsieur le poète, vous allez vous rendre en prison pour huit jours, répliqua le professeur qui malheureusement m'entendit.
Lambert reprit doucement en me jetant un regard d'une inexprimable tendresse: Vir nobilis !"
Cette dimension ésotérique ne peut normalement se partager avec les autres comme un repas que l'on prendrait ensemble. Aussi, dans la pensée japonaise, cette "sensation" bien particulière prend le nom raffiné de "Kanshoku" , qui signifie populairement "manger entre les repas".