Sur la ferme, deux hypothèques pesaient, détenues par des banquiers avares et insensibles. À la fin de l’année, nous fûmes expulsés, et ma mère reçut cent cinquante dollars en compensation.
Mes deux frères trouvèrent du travail chez d’autres agriculteurs. Ma mère, elle, commença à travailler pour de riches fermiers, et je dus, à mon tour, gagner ma subsistance tout en poursuivant mes études.
Mes tâches restaient inchangées, semblables à celles d’autrefois. Née avec une grande fierté, je souffrais en silence dans cet environnement imposé. Nul ne saura jamais combien mon âme fut meurtrie, mais mon ambition demeurait intacte : obtenir une éducation, gagner assez d’argent et offrir un foyer à ma mère.
Je fréquentais une petite école de campagne. Mes professeurs, impressionnés par ma vivacité d’esprit et ma rapidité d’apprentissage, me portaient une attention particulière.
Une école, dirigée par un pasteur épiscopalien et ses deux filles, attira mon attention. Une famille de cinq enfants, vivant dans une grande ferme près de cette école, m’accueillit pour que je puisse travailler en échange de ma pension et y étudier.
Chaque jour, je me levais à cinq heures pour aider à traire les vaches, laver les seaux et les bidons de lait, puis me précipiter à l’école. Le soir, je travaillais jusqu’à onze heures. Le samedi, mes journées s’étendaient de cinq heures du matin à onze heures du soir. Pourtant, je supportais tout sans me plaindre, portée par mon ardent désir de savoir.
Je ne me souviens pas d’avoir jamais résisté aux tâches qu’on m’imposait. Toute ma vie, j’ai adopté une attitude de soumission face au devoir. Je n’ai jamais cherché à faire ceci ou cela selon mes envies. Le devoir a toujours guidé mes pensées quotidiennes, et il en va encore ainsi à l’âge de quatre-vingt-neuf ans.
À quinze ans, on me conseilla de poursuivre mes études au lycée de St. Albans, où se rendaient les élèves les plus avancés du comté. Trouver un logement fut difficile, mais nous finîmes par dénicher un endroit calme où je pouvais étudier tout en travaillant.
Le premier soir, épuisée, je me couchai tôt et pleurai toute la nuit. Dans cette famille, on me traitait comme une simple domestique, m’interdisant de m’asseoir à leur table.
Quel choc pour mon esprit fier !
Ma mère, blessée autant que moi, souffrait de cette situation. Partout où elle avait travaillé, nous avions toujours été traitées comme des membres de la famille. Ma sœur aînée, qui vivait avec sa nombreuse famille dans une ferme, suggéra que j’intègre un couvent, où je n’aurais pas à travailler.
Nous prîmes donc les dispositions nécessaires. Les sœurs acceptèrent de m’accueillir, à condition que ma mère paie huit dollars par mois pour ma scolarité, ma sœur fournissant la nourriture. Pendant un an, mon beau-frère me conduisit chaque dimanche soir au village avec ma nourriture pour la semaine, dans son vieux buggy tiré par une jument, et venait me chercher le vendredi soir.
Je terminai mes études au lycée de St. Albans à seize ans. Aussitôt, je m’installai chez un vieux couple vivant près de la ferme de ma sœur. Ils partageaient leur maison avec leur fils et sa belle-fille, tout en disposant de leur propre logement.
La belle-fille s’intéressa immédiatement à moi et décréta que je ne devais plus accomplir de tâches subalternes. Amie du surintendant des écoles de North Fairfax, dans le Vermont, elle lui demanda s’il accepterait de me confier une classe. Il y consentit.
Après un examen, il me délivra un certificat m’autorisant à enseigner dès l’été. Pour la première fois, je me sentais à ma place. Un rêve se réalisait : enseigner était, pour une jeune fille, la seule profession respectable, celle qui permettait d’être une dame plutôt qu’une domestique.
À l’époque, aucune femme ne travaillait dans les magasins ou les bureaux, comme c’est le cas aujourd’hui. Il n’existait ni secrétaires ni sténographes. Enseigner représentait le sommet des aspirations pour une jeune fille.
Pouvez-vous imaginer ce que signifiait un salaire de trois dollars par semaine, tout en devant loger chez différents fermiers ?
C’était la coutume. J’aimais les enfants, et cet amour était réciproque : ils m’aimaient en retour.
Ce premier été et cet automne furent suivis d’un hiver dans l’école du village où vivait ma sœur. Ce fut un défi, avec des élèves difficiles, des garçons de dix-neuf ou vingt ans, fils de fermiers. Mais je tins bon.
L’été suivant, une autre sœur, installée à Sciota, dans l’État de New York, de l’autre côté du lac Champlain, m’invita à enseigner là-bas. J’y passai un an, avant que ma mère ne me demande de revenir plus près d’elle.
Anglais :
There were neither secretaries nor stenographers. Teaching was the highest aspiration for a young girl.
Allemand :
Es gab weder Sekretärinnen noch Stenografinnen. Lehrerin zu werden war das höchste Ziel für ein junges Mädchen.
Espagnol :
No existían ni secretarias ni taquígrafas. Enseñar representaba la mayor aspiración para una joven.
Italien :
Non esistevano né segretarie né stenografe. Insegnare rappresentava la massima aspirazione per una ragazza.
Portugais :
Não existiam nem secretárias nem taquígrafas. Ser professora era o auge das aspirações para uma jovem.
Grec :
Δεν υπήρχαν ούτε γραμματείς ούτε στενογράφοι. Η διδασκαλία ήταν η ύψιστη φιλοδοξία για ένα νεαρό κορίτσι.