Voici un extrait d'une lettre très instructive envoyée le 23 Mars 1790 par le député André (en réalité Jean-André) Périsse Duluc (1738-1800) à Jean Baptiste Willermoz. Elle est issue du fond Willermoz référence MS 5430 à la Bibliothèque Municipale de Lyon.
André est un intime de Willermoz, il appartient à une famille lyonnaise d'imprimeurs et il complète avec son frère Antoine cette activité par celle de libraire. Il fait partie de tous les cercles intérieurs: franc-maçon, élu-coen, Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte, Grand Profes (et vraisemblablement membre de l'AGLA, mais n'anticipons pas...) et il est ouvertement très proche de la sœur aînée des Willermoz, veuve, que l'on nomme Madame Provensal et qui est aussi initiée à tous ces grades... C'est vraisemblablement la seule femme de l'époque dans ce cas.
Entre autres détails, la lettre de Périsse Duluc montre qu'il est plus proche, que Louis-Claude de Saint Martin, de Jean-Baptiste Willermoz...
Sa critique un peu vacharde de Saint-Martin confirme entre les lignes que Willermoz se montrait contrarié dans l'intimité par la publication dans les ouvrages de LCSM de certains enseignements qui auraient pu rester réservés aux cercles fermés des loges.
C'est un détail qui ressortait déjà des messages d'Eglé de Vallières (l'Agent Inconnu) que celle-ci avait capté du monde invisible ou plus précisément dans l'aura de son petit frère Alexandre de Monspey.
Voici le blason d'Andrea Périsse du Luc issu de l'armorial des dignitaires de la Province d'Auvergne.
Nous lisons Frater Eques Andreas A Tribus Lunis (frère chevalier André aux 3 lunes). Les 3 lunes dorées disposées en triangle pointe en bas sur fond bleu nuit, suggèrent la capacité de canaliser la force cosmique dans le monde invisible...
"Commandator Lugdunumsis" délégué de Lyon.
QUOD ACCIPIO REDDO (celui qui reçoit et redonne).
PARS MOTU (une pièce du moteur).
A l'évidence, le personnage explique qu'il a une initiation ésotérique à transmettre!
Voici enfin la lettre retranscrite au mieux (aidé en cela des travaux d'Anissa Rousse 2013 que nous remercions).
"Il me parait, par les lettres de mon frère, que vous avez été malade à Lyon ou comme je le pense que vous en avez pris le prétexte, pour vous retenir en particulier.
"Saint-Martin arrivé depuis peu de Strasbourg en a fait autant, je pense, puisqu’il a été passer ces jours-ci à la campagne.
"Je ne l’ai pas encore vu, quoique j’aie entre les mains un nouvel ouvrage de lui, dont vous ne m’avez pas parlé. Cependant il me vient de Lyon.
"Il a pour titre L’Homme de désir, format in8° et 301 paragraphes.
"Il me parait au coup d’œil, n’ayant pu le parcourir, faire beaucoup d’allusions hiéroglyphiques et mystiques aux travaux des Coh.. (des élus coens Note du Bistrot).
"Jugez-le et dites moi ce que vous en pensez. J’y ai vu de belles choses, de très obscures, et un style poétique que l’auteur détestait grandement autrefois.
"Souvent il prend le ton élevé du psalmiste et des cantiques, plus souvent encore le style apocalyptique, tout cela mêlé des tournures de la poésie allemande des Klopstock et des Gesner, par où l’on voit qu’il a pris à Strasbourg le goût du terroir.
"Mais qu’importe le style et les formes, si les idées en sont grandes, sublimes et si instructives, et j’en ai remontré en grand nombre de cette classe et surtout de très profondes.
"J’embrasse ma très chère femme madame Provensal, son fils, Terri, le docteur et sa femme, et je vous prie de vous charger de ma fonction.
"L’heure pressante m’appelle à la séance.
"Mon cher M. (Maître, note du Bistrot) priez pour moi, car en vérité les distractions, les intrigues, les cabales, les affaires, m’ont tellement arraché de moi-même, que je ne trouve plus, que je ne cherche plus, la porte pour y rentrer."