Après le départ d'Arnaud, la cour de Charlemagne se déplaça en Italie entre 780 et 781.
C'est à cette occasion que l'empereur décida Alcuin d'œuvrer avec lui (voir l'ancien message du Bistrot "Alcuin, celui qui inventa l'école").
C'est également là que l'empereur décida Godescalc un moine de sa suite, inspiré par les artistes italiens, de réaliser la décoration d'un évangéliaire.
L'évangéliaire c'est le livre qui contient les évangiles susceptibles d'être lus lors des célébrations pour le peuple: la "liturgie" (en grec λῃτουργία, leitourgía, de λαός / laós, le peuple » et de ἐργο, ergo l'action).
Godescalc réalisa donc des miniatures magnifiques (voir photo ci-dessus) laissant toutefois transparaître sa pensée saxonne très structurée et légèrement fataliste.
L'évangéliaire de Godescalc était d'une grande richesse et une quantité d'autres lui succédèrent.
La règle était la suivante: "Aurea purpureis pinguntur grammata scedis"... c'est à dire "des lettres d'or peintes sur des pages pourpres" (l'inverse de l'affichage du Bistrot en quelque sorte!).
Le pourpre des évangéliaires était produit initialement par les phéniciens grâce à un coquillage, le murex, qui leur servait principalement à colorer des étoffes.
Et, lorsque la recette que détenaient les phéniciens fut connue, le murex devint tellement prisé qu'il disparut significativement du pourtour méditerranéen...
Il est plaisant d'imaginer que de son côté Arnaud avait commencé son périple et était tout naturellement parvenu à Byblos. (voir ou revoir "Maneros, l'initié de Byblos"...).
A cette époque la région côtière était sous domination arabe, l'impérialisme romain était totalement évacué, il avait fait l'unanimité contre lui depuis plusieurs siècles, mais les habitants, sous influence byzantine (grecque) vivaient difficilement leur situation.
En effet lorsque les omeyyades, la première dynastie arabe sunnite avait envahi le pays, ils avaient installé en 661 leur capitale à proximité, à Damas et ils utilisaient le savoir faire byzantin des artisans locaux.
Byblos, devenue Jubaïl continuait alors de bénéficier d'une économie prospère basée sur la richesse agricole de la plaine de la Bekaa, et commerçant avec les autres ports musulmans de la méditerranée.
Mais en 750, lorsque les abbassides (eux aussi sunnites) renversèrent les omeyyades et installèrent leur capitale à Bagdad, une récession s'installa, jointe à une certaine répression...
Pour les fonctionnaires, l'arabe devait remplacer définitivement le grec, l'araméen et le syriaque tandis que le calife local s'opposait aux chrétiens orthodoxes en nommant leur patriarche, lequel pouvait exprimer son hostilité aux chrétiens indépendants maronites...
Bref, les nombreuses communautés voulant sauvegarder leur identité linguistique et religieuse, et qui ne se repliaient pas encore vers les montagnes, envisageaient sérieusement de le faire...
Ressentons-nous dans cette ambiance tendue le début de la Quête d'Arnaud, le fameux point de départ où l'on "demande son chemin à des enfants"?
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