Ils se divisent en quatre classes suivant l'élément qu'ils régissent:
- esprits du feu ou salamandres,
- esprits de l'air ou sylphes,
- esprits de l'eau ou ondins,
- esprits de la terre ou gnomes.
Mais laissons cette figure de l'illuminisme du 19e siècle nous raconter la suite:
"Parmi les sylphes se trouvent les fameux esprits atmosphériques des théologiens, et parmi les salamandres bon nombre de leurs diables.
"Ces esprits ont fait l'objet d'une fable célèbre autant qu'erronée de l”abbé de Villars. Dans son ouvrage intitulé "Le comte de Gabalis", cet auteur raconte que ces esprits sont mortels, mais peuvent acquérir l'immortalité en contractant des mariages avec l'espèce humaine.
"L'abbé de Villars représente ces esprits comme presque semblables aux anges, beaux, nobles, puissants, intelligents, purs, et décrit ces mariages singuliers sous des couleurs les plus poétiques.
"Mais c'est là une fiction aussi erronée que dangereuse. D'abord il est inexact de dire que les esprits élémentaires soient mortels, ils sont parfaitement immortels. Il est non moins faux de croire que l”homme puisse transférer l'immortalité à quelque autre créature.
"Dieu seul peut transférer l'immortalité. Quant aux prétendus mariages possibles dont parle l’abbé de Villars, ce sont les abominations de l'incubat et du succubat.
"Les hommes ressemblent toujours aux enfants en ce sens que chacun d'eux est très fier de pouvoir faire quelque chose que les autres ne font pas : entrer en communication avec l'invisible a toujours été pour cette raison un objet de leurs désirs ; ils ont en même temps brodé des fictions poétiques autour de cette idée, et cherché à représenter ces communications comme quelque chose de surnaturel et d'admirable, plaçant celui qui en est favorise au-dessus du commun des mortels.
La réalité est infiniment moins poétique, les communications que les humains parviennent à établir avec des "esprits" n'ont généralement rien d'honorable du tout pour ceux qui en sont l'objet.
"Pour se faire une idée nette de nos rapports avec les êtres de l'invisible, ce n'est pas sur des romans ni même sur des traités d'occultisme qu'il faut s'exalter l'imagination c'est clans les œuvres des mystiques, gens de sang froid, qui voient la réalité comme elle est, et qui la disent comme ils la voient, que l'on trouvera les meilleurs renseignements.
"A l'appui de ce que nous avançons sur le récit de phénomènes d'incubat dont nous avons connaissance, un dame ayant lu l'ouvrage de l'Abbé Villars se laissa enthousiasmer et rêva d'évoquer pour le voir de plus près un de ces êtres invisible et merveilleux. Elle se mit à réciter l'oraison des salamandres en faisant une sorte de prière jaculatoire en faisant appel à l'être invisible. A sa grande déception rien ne lui répondit, aucune espèce de phénomène ne se reproduisit
"A deux jours de là comme elle venait de se coucher elle sentit soudain son drap se soulever et une forme humaine se glisser dans son lit. Épouvantée elle se hâta de faire la lumière et ne vit rien; elle éteignit et le même phénomène se reproduisit, elle se sentit enlacée tandis qu'une voix lui disait: tu m'as appelé, me voilà.
"La dame épuisée quoique secrètement satisfaite d'avoir réussi son expérience essaya vainement de toucher la forme qu'elle avait près d'elle mais ses mains ne rencontraient que le vide . Pour ce soir là il n'y eut pas d'autre phénomène.
"Mais la même scène se renouvela la nuit suivante puis toutes les nuits et le détail de ce qui s'en suivit n'est plus narrable hors de la consultation médicale. Il y eut incubat et succubat, il y eut même violence.
"Bientôt la malheureuse victime, hantée, obsédée en proie à un dégoût et à un écœurement grandissant, l'esprit perpétuellement hanté d'obscénités et de turpitudes sans nom violentée et frappée quand elle essayait de résister tomba dans un abattement profond et devint réellement malade.
"C'est alors qu"elle vint nous consulter. Il nous fut heureusement possible de la délivrer et elle retourna dans son pays dégoûtée à jamais de son envie d'invoquer les salamandres. Le secret professionnel nous oblige naturellement à ne pas préciser davantage les circonstances de cette histoire. "
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Papus (1865-1916) créa à Paris une "Ecole de Science Hermétique" et c'est le personnage de la photo, le Docteur Fernand Rozier (1839-1922) qui assura ce cours en 1905.
Le docteur Rozier fut un étudiant d'Eliphas Levi (1810-1875). Tous deux étaient convaincus de pratiquer de la Haute Magie avec des évocations angéliques... (Précisons au moins que ça pourrait se discuter!)
Le cours est retranscrit d'après des notes manuscrites du fils de Papus, Philippe Encausse (1906-1984).
Au sujet du Comte de Gabalis, voir en particulier la fameuse "promesse" que l'on retrouve dans le rosicrucianisme.