Il existe un poème intitulé "Sonnet Philosophique" qui est écrit par le Comte de Saint- Germain, dont le seul portrait connu est cette gravure du Chateau de Chambord. Le sonnet est probablement le seul écrit qui peut lui être attribué. En effet, "la Très Sainte Trinosophie", que Chacornac publia en la signant du nom de Saint-Germain, est certainement une œuvre de Cagliostro lorsqu'il était emprisonné au Château Saint-Ange. Il y a encore quelques années, ce poème semblait difficile à trouver en français... Il fut publié dans un recueil en 1795 intitulé "Poèmes Philosophiques".
Une version traduite en anglais apparait dans la mouvance de Spencer Lewis et la version française, qui en découle, se retrouve donc à nouveau traduite à partir de l'anglais... La voici:
Scrutateur curieux de toute la Nature,
j'ai connu le commencement et la fin du grand Tout.
J'ai vu l'or dans toute sa puissance dans les profondeurs de la mine;
J'en ai saisi la substance et j'ai compris les fermentations de son levain.
Je pourrais expliquer par quel art l'âme fait son nid
Dans les flancs d'une mère et poursuit sa progression,
et comment une graine de blé, et un pépin de raisin, tous deux,
quand ils sont mis sous la poussière humide,
Deviennent pampre du blé et raisin de la vigne, et finalement pain et vin.
C'était le néant, Dieu voulut, le néant devint quelque chose
J'en doutai, je cherchai sur quoi l'univers est basé ;
Rien ne le tenait en équilibre et rien ne le soutenait.
Finalement, à la mesure de la prière et de l'opprobe,
Je mesurai l'éternité ; Il rappela mon ame,
Je mourus, j'adorai, je ne sus plus rien.
Naturellement il est tentant pour un rosicrucien actuel de vivre un moment mystique privilégié en essayant de s'harmoniser avec la pensée du Grand-Maître en tentant de reconstituer le sonnet initial... et puis "la loi cosmique s'accomplit": si l'ardeur au travail est suffisante, le puissant Grand-Maître ne manquera pas de fournir sa version initiale comme corrigé...
Voici par exemple un essai:
Observateur curieux de la nature divine,
J'ai connu du grand tout, le début et la fin
J'ai vu l'or, en puissance dans le fond de la mine,
J'ai saisi sa substance et capté son levain
Je pourrais révèler tout l'art dont l'âme nide,
Puis s'incarne ou grandit. Comment du blé, le grain,
Du raisin, le pépin, dans le limon humide
Deviennent épi, et pain, ou de vigne, le vin.
Du néant, voulut Dieu, retirer quelque chose?
J'en doutais en cherchant où l'univers se pose:
Rien ne l'équilbrait et ne le tenait. Rien!
De prière et d'opprobre, je parcourais la gamme
Et mesurais le temps. Il rappela mon âme
Je mourus, j'adorai, et je ne sus plus rien.
Et le soir même le Grand Maître se manifestait en communicant son propre texte:
Sonnet Philosophique
Curieux scrutateur de la nature entière
J'ai connu du Grand Tout le principe et la fin
J'ai vu l'or en puissance au fond de sa minière
J'ai saisi sa matière et surpris son levain.
J'expliquai par quel art l'âme au flanc d'une mère,
Fait sa maison, l'emporte, et comment un pépin
Mis contre un grain de blé sous l'humide poussière,
L'un plante et l'autre cep sont le pain et le vin.
Rien n'était, Dieu voulut, rien devint quelque chose,
J'en doutais, je cherchai sur quoi l'univers pose
Rien garde l'équilibre et servait de soutien.
Enfin, avec le poids de l'éloge et du blâme,
Je pesai l'éternel, il appelle mon âme,
Je mourus, j'adorai, je ne savais plus rien.
La parenté avec le précédent sonnet est amusante et instructive: on voit bien les passages avec lesquels le premier sonnet est en phase avec Saint Germain et ceux qui ont dépassé sa perception.