Pourquoi cet intérêt si particulier pour cet Alden de la part de rosicruciens qui n'éprouvent pourtant aucune attraction particulière pour toutes les formes habituelles de culte de la personnalité?
Les habitués du Bistrot doivent commencer à être familiarisés avec l'idée que le rosicrucianisme, tel qu'il fut transmis aux américains depuis 1915 et durant encore quelques dizaines d'années après la mort de Spencer Lewis en 1939, contenait derrière l'enseignement d'une certaine culture rosicrucienne adaptée au 20e siècle les fameuses passerelles qui conduisaient à l'enseignement ésotérique.
Par définition, cet enseignement ésotérique ne peut être compris de ceux qui ne sont pas prêts et il est donc impossible de le révèler avec la meilleure volonté du monde: les secrets ésotériques se défendent tous seuls.
"Aucun mortel n'a soulevé mon voile" était une parole attribuée, dans le monde grec, à la déesse Isis, expliquant ainsi que seuls les êtres ayant déjà accédé à leur "immortalité", en ayant pris conscience de leur être psychique ou de vies passées, pouvaient réellement commencer à percevoir...
Cela met en évidence une barrière à franchir entre le rosicrucianisme populaire de la recherche de la "Paix Profonde", lequel constitue le cercle extérieur, et le rosicrucianisme du cercle intérieur, les Illuminatis dont il est à peine possible d'évoquer leur authentique "Joie Ineffable"...
Ce long apparté permet de suggérer l'idée que "Alden" constitue une passerelle encore visible entre le cercle extérieur et un certain enseignement du cercle intérieur.
Une première manifestation de cette passerelle apparait dans une initiation, lorsque le candidat est déclaré avoir été préparé à "entrer dans le Temple d'Alden".
Une autre manifestation se présente dans la fameuse "Confessio de Spencer Lewis", dans laquelle il raconte qu'une voix se fit entendre lors d'une expérience en Californie pour lui dire:
"Lève-toi de la tombe où tu reposais et marche dans le monde où, dans ta résurrection par la croix, tu devras être connu sous le nom d'Alden."
La "résurrection PAR la croix" étant à comprendre dans un sens rosicrucien sans projeter de référence chrétienne.
"Alden" ou "Sar Alden" apparaît comme le "nomen" (le nom ésotérique) de Spencer Lewis qui signa parfois certains articles ou même son testament de "Saralden."
Et dans le testament, nous relevons ce passage:
"Et, à tous mes Fratres et Sorores des Illuminatis, et tout spécialement à ceux de la Hiérarchie, je lègue mon amour en reconnaissant leur loyauté et leur dévotion.
Puissent-ils ne jamais avoir à subir les tests que j'ai dû affronter pour préserver la respectabilité et maintenir l'intégrité de l'AMORC.
Pour eux dans le futur, je serais connu d'eux comme ALDEN et mon nom dans la Hiérarchie sera SARALDEN à l'occasion à nouveau sur terre."
Il se profile l'idée d'une jeu de piste à la recherche de la "première résurgence américaine" qui ne serait pas celle de Kelpius, comme on est généralement porté à le penser mais "autre chose".
D'ailleurs, le Manuel Rosicrucien reprenait également un article du "The Mystic Triangle" et précisait:
"Ahldain" ou "A'ldain" (prononcer Awl-den) est le nom d'un ancien maître de la Grande Fraternité Blanche à qui l'on accorda au 10e siècle la juridiction pour l'établissement de centres mystiques sur le continent nord-américain, et dont le premier Temple Rosicrucien américain prit le nom en 1603.
Et naturellement nous avons reconnu dans "Alden" une racine européenne signifiant "l'ancien" comme dans l'anglais "old" ou l'allemand "alt" et qui évoque un "Frère Aîné"...
Il nous reste enfin à parler du poème de Spencer Lewis "To the Temple of Alden", dont le Bistrot a commencé la traduction, grâce à la bienveillante contribution de Soror P. et qui nous révèle le mystère d'Alden, étapes par étapes, avec une rare poésie.